10 septembre - Pousser la ligne : Bloquons tout !

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Entre premières réunions physiques, création des réseaux sociaux et stabilisation des chaînes Telegram et de la modération, le mouvement du 10 septembre n’en est qu’à ses balbutiements. Et pourtant, à trois semaines de la date (!), il semble déjà plus préparé à la mobilisation que l’intersyndicale nationale.

Fin juillet, le secrétaire confédéral de la CGT Thomas Vacheron déclare que “Le seul endroit pertinent pour bloquer le pays, c’est l’entreprise”¹, sous entendu “Prenez votre carte et on verra après”. Il y aurait de quoi pester.

Néanmoins, c’est en le prenant au mot que nous pourrions pousser l’intersyndicale (nous ne parlons pas des unions locales et départementales) à se mobiliser. Car, quels moyens sont les plus à même d’instaurer un rapport de force : Bloquer la rocade ou les entreprises ? Soutenir une grève des travailleur.euses ou bloquer nous-mêmes ce qu’on veut, quand on veut ? Il ne s’agit pas d’opposer grève et blocage, nous avons besoin des deux. Cependant, c’est en poussant ces questions et en adoptant le mot d’ordre “Bloquons tout!”, que nos actions pourront poser un dilemne à la CGT et consorts : Est-il possible de bloquer le pays sans eux ? Par peur de perdre le monopole de la contestation organisée, l’intersyndicale sera alors plus encline à appeler à des journées de grève et de manifestation ce dont les Gilets Jaunes, malgré toute leur force, ont amèrement manqué.

Ensuite, la ligne “Bloquons tout !” - qui figure dans l’appel original au 10 septembre - apporte une perspective stratégique immédiate : Toutes les forces dans le blocage, pour le 10S et pour les jours d’après. À la limite de la légalité, le blocage a l’avantage de parler à l’intelligence collective des gens : tout le monde participe et chacun peut réfléchir à rendre un blocage plus joyeux et efficace. Qui plus est, il n’empêche pas à d’autres actions de se tenir, telles que des manifestations, des auto-réductions, du harcèlement d’élus à coups de casserolles et des distributions alimentaires.

L’avantage est que “Bloquons tout!” n’est pas qu’un mot d’ordre, c’est une perspective d’action. Tout ce temps pour préparer une date, cela peut être long, et la tentation de discussions permanentes et de création illimitées de sous-groupes pourrait apparaître. “Bloquons tout!” remet les choses au centre : nous nous réunissions pour agir. Non pour réclamer mais pour agir, prendre, et en l’occurence : bloquer.

Autre intérêt, “Bloquons tout!” est un mot d’ordre reproductible et réappropriable. Un nouveau groupe local 10S se créée ? Il a déjà une idée de ce qu’il peut faire. L’appel au blocage pourrait spécifiquement être repris dans les universités, celles-ci s’étant déjà mobilisées il y a quelques mois contre l’austérité budgétaire, que le Plan Bayrou aggrave. De manière générale, élargir la base sociale du mouvement sans perdre en radicalité est un des enjeux de la réussite du 10S. La lutte contre l’austérité généralisée, avec des mots d’ordre tels que “Tout est trop cher!”, se conjuguant parfaitement au “Bloquons tout!”. Et comme aux meilleurs temps de la contestation de la réforme des retraites de 2023 et des opérations “Villes Mortes Grand Ouest”², un appel coordonné au blocage des grands axes routiers pourrait être réfléchi.

Enfin, à partir du 1er octobre aura lieu l’étude du budget à l’Assemblée Nationale et il est probable que le gouvernement Bayrou soit renversé (le RN ayant pour le moment annoncé voter la censure). Bien que la mobilisation ne doive en aucun cas se calquer sur le calendrier parlementaire, la perspective d’une chute du gouvernement pendant un mouvement social serait inédite et, qui sait, embrasante.